jeudi 10 juillet 2008

S. Sepehri : À Golestâneh



S. Sepehri



À Golestâneh

Des plaines si vastes !
Des montagnes si hautes !
À Golestâneh, il y avait une telle odeur d'herbe !
Moi, dans ce hameau, j'étais en quête de quelque chose :
Quête d'un rêve peut-être,
D'une lumière, d'un caillou, d'un sourire.

Derrière les peupliers
I1 y avait une insouciance pure, qui m'appelait.

Je suis resté au pied d'une roselière, le vent soufflait, j'ai tendu l'oreille :
Qui me parlait ?
Un lézard a glissé.
Je me suis mis en route.
Un champ de luzerne sur le chemin,
Puis les plants de concombre, les touffes de carthames*
Et l'oubli de la terre.

Au bord de l'eau
J'ai ôté mes guivés** et me suis assis, les pieds dans l'eau :
" Que je suis vert aujourd'hui
Et comme mon corps est en éveil !
Fasse que nulle tristesse ne survienne de derrière la montagne !
Qui est là-bas, derrière les arbres ?
Rien, une vache broute dans le clos.
C'est un midi d'été.
Les ombres savent quel été.
Des ombres sans tache,
Un coin clair et pur,
Enfants des sensations ! l'aire de jeux est ici.
La vie n'est pas creuse :
Il y a la tendresse, il y a la pomme, il y a la foi.
Oui
Il faut vivre, tant qu'existent les coquelicots.

Dans mon cœur se trouve une chose, comme un bosquet de lumière, comme
le sommeil du petit jour
Et je suis si fébrile que j'ai envie
De courir jusqu'au bout de la plaine, de grimper en haut de la montagne.
Dans les lointains il est une voix, qui m'appelle. "

* Safran bâtard ou safran des teinturiers.
** Sortes de babouches dont l'empeigne est en coton et la semelle en corde ou en cuir.


Poème extrait de VOLUME VERT de Sohrâb SEPEHRI
(traduit du persan par Tayebeh HASHEMI et Jean-Restom NASSER)

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