mardi 25 novembre 2008

Saillies




"De la plante des pieds elle épouse la terre, talon voûte orteil posent des baisers de chair sur le sol sablonneux, les cailloux du chemin, les herbes tendres et les herbes dures des sentiers du rêve, car le rêve est le monde, et dans ce monde les humains se mettent en marche, passé présent et avenir confondus dans une même aventure, portés par le rêve de leurs pieds les humains parcourent le vaste espace, défaits de toute lourdeur les humains nomment et animent le monde, leurs pieds nomment toute chose du chemin, arbre pierre rivière, donnent histoire à toute chose, et les peuples se croisent, peuplent le monde de réseaux, des pieds par myriades foulent le sol en suivant les dessins du tableau, jaune, rouge, la terre se pique de myriades de pas, pour seule richesse et possession les humains ont leurs pas, leurs pas mot après mot qui tracent des phrases dans l'espace...."

Alina Reyes

dimanche 23 novembre 2008

S. Sepehri : Au jardin des compagnons de voyage


S. Sepehri


Au jardin des compagnons de voyage

Appelle-moi.
Ta voix est bonne,
Ta voix est la chlorophylle de cette plante étrange
Qui pousse aux intimes confins de la mélancolie.

Face aux dimensions de cette ère silencieuse,
Moi, je suis plus seul que la saveur d'une mélodie dans le champ de perceptions d'une ruelle.
Viens, que je dise pour toi combien ma solitude est grande.
Mais ma solitude ne prévoyait pas l'attaque nocturne de ton volume,
Et le propre de l'amour c'est cela.

I1 n'y a personne,
Viens, dérobons la vie
Et partageons-la entre deux rencontres.
Viens, qu’ensemble nous comprenions quelque chose à l'état de la pierre.
Viens, et plus vite nous apercevrons les choses.
Vois les aiguilles du jet d'eau sur le cadran du bassin :
Elles transforment le temps en poussière.
Viens te dissoudre comme un mot dans la ligne de mon silence,
Viens fondre au creux de ma main le corps luminescent de l'amour.

Réchauffe-moi
(D'ailleurs un jour, dans la steppe de Kâchân, le temps se couvrit,
I1 tomba une forte pluie,
Et j'eus froid ; alors, à l’abri d'une pierre,
L'âtre du coquelicot me réchauffa.).

Dans ces venelles obscures,
Moi, j'ai peur du fruit de la multiplication du doute et de l'allumette,
J'ai peur des surfaces cimentées du siècle.
Viens et je n'aurais plus peur de ces villes dont la terre noire sert de pâture aux grues.
Ouvre-moi, porte donnant sur la chute des poires dans cette ère d'ascension de l'acier.
Endors-moi sous une branche loin de la nuit des frictions du métal.
Si l’orpailleur du gisement de matins arrive, appelle-moi !
Et, au lever d’un lilas derrière tes doigts, je m'éveillerai.
Alors
Raconte ces bombes tandis que je dormais, et qui tombèrent.
Raconte ces joues tandis que je dormais, et qui se mouillèrent.
Dis combien d'oiseaux s'envolèrent de sur la mer,
Et dans ce branle-bas des chenilles de tank passant sur un rêve d'enfant,
Au pied de quelle sensation de repos le canari fixa le fil jaune de son chant.
Dis quelle innocente marchandise pénétra dans les ports,
Quelle science découvrit la musique positive de l'odeur de la poudre,
Quelle perception de l'inconnue saveur du pain exsuda des papilles de la prophétie.

Alors moi, telle une foi chaude du feu de l'équateur,
Je t'assiérai au commencement d'un jardin.


Poème extrait de VOLUME VERT de Sohrâb SEPEHRI
(traduit du persan par Tayebeh HASHEMI et Jean-Restom NASSER)

mardi 11 novembre 2008

De la crudité

Une vue de ma pauvre pensée insuffisamment critique...



"Au sens usuel et étroit, le terme « anthropomorphisme » définit le procédé erroné et illégitime par lequel une pensée insuffisamment critique attribue à des objets situés hors du domaine humain - objets naturels ou objets divins - des prédicats empruntés à la détermination du domaine humain, à des fins explicatives ou simplement représentatives. Concept essentiellement critique, sa fonction est de dénoncer une erreur d'un type particulier, sorte de vice inhérent à la nature humaine, propension de l'homme à se représenter sous forme humaine tout ce qui n'est pas lui, soit comme effet d'une simple projection, soit sous une forme conceptuellement élaborée et presque doctrinale. Dans un sens large et moins usité, pris à la lettre de son étymologie, ce terme peut désigner l'acte de doter quelque chose de la forme humaine : créer de toutes pièces un objet ayant forme humaine au sens plastique du terme, ou revêtir un objet déjà existant de forme ou d'attributs humains. Ce concept nous renvoie alors, dans un sens positif, à une activité créatrice et significative par elle-même..."

Définition empruntée à la partie gratuite de "universalis.fr Le portail de la connaissance"