dimanche 31 mai 2009

Anatomie d'une solitude




On a dit qu'il était passé
par le tamis des songes,
qu'il avait les reins fiévreux d'un chat,
qu'il retenait son âme avec les dents —
lambeau d'air et de bleu.

André Velter

samedi 30 mai 2009

Presque seul




Si la lumière s'éteint, tu restes seul dans la nuit,
et ce sont tes yeux ouverts qui t'éclairent.

Philippe Jaccottet

mardi 26 mai 2009

Aucun lieu, nulle part




Et des anges noirs volaient
dans le souffle du couchant.

dimanche 24 mai 2009

Alors, salut !




Rien, cette écume, vierge vers
À ne désigner que la coupe ;
Telle loin se noie une troupe
De sirènes mainte à l'envers.

Nous naviguons, ô mes divers
Amis, moi déjà sur la poupe
Vous l'avant fastueux qui coupe
Le flot de foudres et d'hivers ;

Une ivresse belle m'engage
Sans craindre même son tangage
De porter debout ce salut

Solitude, récif, étoile
À n'importe ce qui valut
Le blanc souci de notre toile.

Stéphane Mallarmé

samedi 23 mai 2009

Soupir




- Vers l'Azur attendri d'Octobre pâle et pur
Qui mire aux grands bassins sa langueur infinie
Et laisse, sur l'eau morte où la fauve agonie
Des feuilles erre au vent et creuse un froid sillon,
Se traîner le soleil jaune d'un long rayon.

Stéphane Mallarmé

jeudi 21 mai 2009

Crie avec tes rires




Ne te livre pas comme un paquet ficelé. Ris avec tes cris ; crie avec tes rires.

Henri Michaux

mardi 19 mai 2009

Entre-deux




Tu tiens vraiment à monter à l'échelle ? Et si c'est pour finir pendu ?

Henri Michaux

dimanche 17 mai 2009

Sur le carreau




Je rêve aux images élémentaires, aux rêves que d'autres, en d'autres situations, d'autres temps et lieux, en des corps différents surtout...ont pu avoir. Leurs images de base - fondements de leur tempérament -, répondant à leurs faims, leurs besoins, leurs penchants, si je pouvais les voir..., à leur débouché comme elles leur arrivent dans l'abandon nocturne, lorsque des accidents de la vie, y ayant jeté le trouble, celui-ci alors les leur remet brusquement en lumière, en désordre, à la diable, groupés avec de l'hétérogène, dans une simultanéité inattendue - baroque et cocasse accord d'un merveilleux sans pareil, ambigu et traître -
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moi, directement me nourrissant de leur matérialité muée.

Henri Michaux

mardi 12 mai 2009

En quête d'hirondelles




Si tu es un homme appelé à échouer, n'échoue pas toutefois n'importe comment.

Henri Michaux

dimanche 10 mai 2009

Viatiques




Le profond, vu avec profondeur, est surface.

Antonio Porchia

vendredi 8 mai 2009

Patience dans l'azur !




Patience, patience,
Patience dans l'azur !
Chaque atome de silence
Est la chance d'un fruit mûr !

Paul Valéry

dimanche 3 mai 2009

Je me suis dépris




(...)
Il se dit : "Mais voilà, je me suis dépris, et il m'y a fallu du temps, mais je me suis dépris quand même."
Alors il est heureux, il ne voit qu'une chose : c'est qu'il est vivant. Il a des yeux qui lui servent à voir, une bouche qui respire, un corps (et il le tâte) pour aller comme il veut, où il veut, tant qu'il veut.
Il voit qu'il a une voix aussi qui lui revient, parce que les mots qu'il pense à présent se forment à mesure avec bruit sur sa langue; une voix qui va plus vite que lui et qui court en avant de lui pour l'annoncer comme ferait un chien.
(...)

Charles-Ferdinand Ramuz, Derborence

vendredi 1 mai 2009

De l'art de l'effacement




S A T O R
A R E P O
T E N E T
O P E R A
R O T A S